Balthazart cerveau
Notre cerveau est-il, en ce qui concerne notre genre, totalement conditionné par notre éducation ? Certaines idéologies en ont fait une vérité coulée dans le marbre, sans d'ailleurs le prouver. Les progrès de l'investigation biologique montrent aujourd'hui que cette vérité n'en était pas une et que le rôle de l'inné a besoin d'être réhabilité, au moins pour partie. C'est ce à quoi s'attache ce très intéressant essai, qui demande une lecture attentive.
 
Deux facteurs sont dominants dans l'évolution sexuelle de l'embryon. L'un est bien entendu le génome et son expression. L'autre est l'exposition aux hormones sexuelles. L'auteur fait le point sur ce qui est connu à ce jour, étant lui-même endocrinologiste. L'affaire n'est pas simple et l'auteur semble parfois craindre de passer sous silence certains travaux, ce qui rend le texte foisonnant. Quoi qu'il en soit, deux conclusions majeures se dégagent.
 
D'abord et pour résumer, le cerveau initial de tout embryon est féminin. Ce n'est qu'au cours de son développement que l'embryon devient masculin. L'homme est issu de la femme et non l'inverse (et la pomme n'y est pour rien !). Une autre constatation mérite d'être notée : les cerveaux féminins et masculins ne sont pas identiques !
 
Ensuite, le caractère genré des comportements est en partie défini par ce processus de développement et ne dépend pas exclusivement de la phase éducative de l'enfant. Des expériences sur l'homme sont évidemment impossibles pour des raisons éthiques, mais l'observation des cas pathologiques et les preuves obtenues sur l'animal rendent cette conclusion sans appel.
En particulier le livre montre que l'homosexualité ne peut pas être un simple acquis, mais possède une partie de ses causes dans des facteurs hormonaux, génétiques et même épigénétiques.
 
Ainsi le cerveau humain, en parallèle avec ce qui a été confirmé pour l'animal, perd une part de son libre arbitre théorique et de sa malléabilité face à la formation. L'éducation n'empêchera pas que 80% des bègues soient des hommes, qui fournissent aussi 83% des autistes, comme le rappelle la 4e de couverture. Et qu'il serait peut-être utile de distinguer les sexes dans la définition de traitements médicamenteux. Ceci ouvre un champ nouveau de recherche...
 
Ce livre un peu difficile à lire apporte une réflexion scientifique plutôt fraîche dans un domaine encore dominé par l'idéologie, particulièrement en France. Certes, comme il le reconnaît, beaucoup de travail reste à accomplir, mais l'apport scientifique ouvre une nouvelle porte et c'est, pour moi, une bonne nouvelle.
 
humenSciences (2019) - 255 pages