taylor inconnu
 
Voici la nouvelle la plus cinglante qu'on puisse concevoir. Brève, moins de 100 pages, sans pitié, elle pointe en quelques échanges de courrier la fragilité des relations qui unissent deux amis. D'une collaboration amicale, la religion hitlérienne fera un brasier de mépris et de haine, jusqu'au crime. Un livre éblouissant par la leçon qu'il donne de la puissance de ces religions mortifères, dont l'écologie est le dernier avatar et éblouissant aussi par une forme épistolaire aussi cinglante que le sont sa trame et sa conclusion.
 
Il serait impossible de raconter cette intrigue sans la déflorer. Posons seulement quelques balises. Deux amis allemands fondent une galerie de peinture en Californie et rencontrent le succès au début des années 1930. L'un est juif et l'autre ne l'est pas, qui rêve de voir son pays vaincu se redresser. Convaincu par le nazisme, il rentre en 1932 en Allemagne et devient un apparatchik du nouveau régime, dont chacun sait qu'il veut le bonheur des hommes, sauf des juifs. Entre amitié et respect du dogme, le dogme l'emportera jusqu'au crime chez le nouveau nazi. De cette trahison procède la suite du roman.
 
Même si ce thème est celui d'un temps qu'on souhaite tous oublier pour sa trahison des valeurs simples d'humanité, ce livre, par la brève violence de son intrigue, violence sans doute nécessaire au rétablissement d'un ordre humain, est un rappel que la soumission aux dogmes et le respect des autres vont mal ensemble. Il rappelle aussi que la séduction de ces dogmes simplificateurs est immense. Ce rappel a une valeur permanente et universelle à notre époque où le credo l'emporte sur le cogito.
 
J'ai Lu 9914 (2012), 86 pages