servan schreiber riches

 

Un beau travail de journalisme "éclairé" sur une rose, l'enrichissement du monde, qui ne montre souvent que ses épines : les inégalités qu'il entraîne. Car le monde s'est beaucoup enrichi. Une bonne nouvelle, non ?

 

Depuis une vingtaine d'années, à l'échelle mondiale, la croissance économique est supérieure à celle de la population. Avec des différences, certes, par zone. L'Asie, par exemple, explose sous nos yeux. La Chine, en particulier, qui a accompagné (préparé ?) cet enrichissement avec sa loi de l'enfant unique. Mais aussi l'Amérique du Sud et même l'Afrique, où le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté est en décroissance constante.

Bonnes nouvelles qui, soit dit en passant, ne font pas la une des journaux. Jalousie d'une Europe à la traîne dans beaucoup de domaines, destruction par les faits du mythe sacré socialisant du capitalisme prédateur, involution d'une société qui va mal et se flagelle ? Et qui se réfugie dans le sacré : l'euro, les droits de l'homme et le principe de précaution, quand ce n'est pas la "théorie" du genre. A quand les croisades ?

Le livre montre aussi que cette richesse (sans doute en partie artificielle, par ce qu'on mesure à la même aune la richesse des produits et services et celle de la spéculation financière) ne va pas sans une contrepartie qui l'a toujours accompagnée dans l'histoire : l'inégalité de sa répartition. Cet enrichissement a exacerbé cette dérive. Jusqu'à quand sera-t-elle acceptable socialement ? La presse, encore elle, ne manque jamais une occasion de "dénoncer" la dérive sans rappeler le formidable bénéfice qu'en tirent l'ensemble des populations. Ce serait politiquement incorrect, sans doute. Et, comme résultat, nous ignorons l'émergence d'une classe moyenne planétaire qui a les mêmes désirs et attentes que nous.

L'analyse, certes rapide, passe sous silence un phénomène qui me semble inquiétant. Notre économie fait du vélo : la dette permet l'investissement qui permet la croissance qui permet l'enrichissement. Et rien n'entrave ce cycle tant que la confiance dure. Mais quand le vélo freine, il tombe : le Japon ( plus de 200% du PIB de dette) se sortira-t-il un jour du trou ? Et encore, sa dette est en grande partie interne ce qui le sauve ; il lui suffit d'oublier de la rembourser. Mais les dettes internationales (USA, Chine, Europe, etc.) sont moins malléables... La bulle devient considérable et peut inquiéter.

Remercions néanmoins l'auteur de ce livre utile, au titre un peu provocateur, mais qui remet en perspective le formidable succès économique de nos sociétés et ne se contente pas d'en dénoncer les conséquences négatives. Lisez vos journaux...

Albin Michel (2014) - 154 pages