szabo porte
 
Ce roman hongrois paru en 1987, profondément original, a reçu le prix "Femina" en 2003.

La narratrice, une femme de lettre, va faire l'éprouvante expérience de l'incapacité à trouver les gestes qui lui permettraient de vivre pleinement son affection intense pour une vieille femme, qui pourtant partage ce sentiment. Elle ne passera pas cette "porte" transparente mais infranchissable qui la sépare d'une amitié qu'elle pressent, simple, partagée, où les mots n'ont plus besoin d'être dits pour être compris. Elle en souffre au point de s'y épuiser et d'en perdre presque la tête et en tous cas la santé. C'est pour moi cette tendresse qui n'aboutit pas qui fait toute la valeur de ce roman.

Il faut dire que l'objet de cette amitié est une dame d'un caractère d'acier trempé, plutôt imprévisible et emporté. Les mots peu amènes fusent dès qu'elle ne se sent pas comprise. Mais qui pourrait la comprendre ? Sans tout à fait quitter le réel, le raisonnable, son esprit s'engage souvent si loin que plus un seul de ses amis ne la suit. Sa solitude poignante prendra d'ailleurs une tournure tragique vers la fin de ses jours.

Si on accepte dans ce récit le personnage extravagant de la vieille dame, sans être irrité par sa stature souvent bien artificielle, alors on aura devant soi un merveilleux roman, éblouissant d'originalité.

Un petit regret, cependant (est-ce le texte original hongrois ou la traduction ?) : les phrases hachées comme un discours pas toujours cohérent fatiguent un peu. Est-ce pour mieux éprouver la peine profonde de la narratrice et son épuisement progressif ?
 
Editions Viviane Hamy (2003) - 280 pages