kraus salauds
 
Un roman du mal et de sa banalité ? Mais, le mal a-t-il encore besoin d'un roman, encore un ? Celui-ci est noir, très noir, très lourd, implacable. Les salauds sont certes aidés par la fabrique, les fabriques, mais ils auraient fleuri et semé leurs graines sans cela. Les salauds sont partout. Il n'y a qu'eux. Pas d'antidote. Certes, des issues existent pour ne pas sombrer. La folie, par exemple ou une balle dans la tête...Vision romanesque et politiquement correcte d'une humanité sans rédemption, ce livre bien torché, mais racoleur, sonne faux sous son masque soigneusement affirmé de roman historique. Ouvrez les yeux, prenez un verre avec vos amis et vivez dans la chaleur humaine de ceux qui vous entourent. Il n'y a pas que des salauds.
 
Le cadre du récit passe de l'embrigadement nazi (encore !) à celui des réseaux d'espionnage. Des fabriques de salauds. Sans un seul rayon de clarté, ceux qui y sévissent sont obligés de révéler leur fibre la plus sombre pour y survivre. Soit. Exactement l'inverse de la série "Bureau des Légendes" qui se construit sur le contraire, tout en se déroulant dans le même univers. Le roman perd sa crédibilité en voulant excessivement faire s'indigner les chaumières. Ce marketing "rentrée littéraire" m'ennuie, car c'est une vision caricaturée de la réalité, sous un masque de vérité. J'ai de bonnes raisons de savoir que nous ne vivons pas chez les Bisounours, mais c'est donner une caution démesurée au pouvoir du mal pour conduire les affaires du monde. Ce roman a le même rapport à la réalité qu'une partie de baby-foot à un match. Relisons Dostoïevski ?
 
Ceci étant, le roman se lit assez bien, pour ce qu'il est, un polar, en dépit de ses prétentions. Il se lirait encore mieux s'il était plus court de moitié et si certains dialogues-monologues vaseux étaient retirés, mais les gros romans sont à la mode...
 
Belfond (2019), 890 pages