fillon_totalitarisme

FF prouve, en publiant ce livre en période préélectorale, qu'il préfère donner priorité à ses convictions plutôt que de rechercher des voix. Face à cette menace islamique avérée, il définit sa stratégie... qui n'est que la partie préliminaire du travail à accomplir. Une réflexion politique bien utile néanmoins.



Il me semble important de ne pas attendre de ce court livre une collection de recettes, mais une stratégie pour la France, face à la menace. Transformer cette stratégie en actes passera dans de nombreux cas par une appréciation exacte de la situation au moment de l'application et par une entente avec les autres pays d'Europe, du moins ceux qui en sont capables et partagent cette stratégie. La tactique devra incorporer des éléments factuels et immédiats pour être efficace. C'est cela, l'art de gouverner. Encore faut-il avoir une stratégie. La situation actuelle montre bien ce qui se passe lorsqu'elle est absente.

Notre position vis-à-vis de l'Islam est tout d'abord incertaine et floue, entre les Français, mais aussi à l'intérieur même de l'équipe dirigeante. Tant et si bien qu'il est impossible qu'un consensus se fasse actuellement. C'est le premier problème. FF rappelle clairement à la fois la position laïque qui accepte la pratique de l'Islam dans notre pays, mais qui la subordonne aux règles de la république. J'ajoute, c'est moi qui le dis et non l'auteur, que la "tolérance" tant vantée est bien souvent la face politiquement correcte  d'une absence d'opinion ou de stratégie...

FF montre aussi à quel point notre réaction est aujourd'hui encombrée par des préoccupations morales (issues des dogmes catholiques pour l'essentiel) qui sont loin d'optimiser l'intérêt général du pays face à la menace. Préoccupations discutables d'ailleurs, aussi diverses que les morceaux d'une "gauche" éclatée, la privant de toute capacité de coordination et de réalisme dans l'action. L'attitude en Syrie, face aux Russes est un exemple de cette dérive stérile. FF saura-t-il convaincre les citoyens que morale et politique sont deux choses complémentaires et non identiques ? Placer l'attitude morale avant la politique, c'est faire exactement ce que prône l'Islam, même quand il n'est pas extrémiste. C'est oublier que 1789 a coupé le cordon, ce que l'Islam n'a pas fait et reste ainsi une religion qui n'est pas comme les autres. Une part importante des citoyens a là-dessus une vision ambiguë, que l’école, par facilité et parfois par affiliation idéologique, ne fait rien pour dissiper. Il est plus facile de prêcher des principes moraux que de penser la politique.

Un autre aspect de cette lutte n'est pas sans difficulté : celle qui implique la participation d'autres pays face à cette menace qui, elle, est bien internationale. FF veut réadapter le cadre européen. Est-ce réaliste ? J'en doute et l'urgence semble telle que la voie européenne, si tortueuse, ne peut que retarder, voire affadir tout accord. Une entente directe et contraignante entre un nombre restreint d'États, est pour moi la seule voie rapide et sûre. Je me répète, sans doute, mais j'affirme que dans le cadre européen actuel, nous n'aurions fait ni Airbus, ni le CERN.

Il n'en reste pas moins que de nombreuses mesures peuvent être prises chez nous, que FF détaille bien ici, portant sur la Justice et ses rapports avec l'Intérieur, les moyens consacrés à l'Armée et à la Justice, le fonctionnement des services de renseignements, la Diplomatie ravagée par le pouvoir actuel, l’exécution et le suivi des décisions pénales, le contrôle des imams, l'affirmation pratique de la laïcité, etc. FF veut aussi renforcer la mission citoyenne de l’école. Tâche certes difficile, mais indispensable, face au marécage des repentances largement partagées par les incultes qui croient que l'histoire commence aujourd'hui.

Un livre qui honore celui qui l'a écrit et dont les propositions seront, à mon avis, mises en œuvre s'il est élu.

Albin Michel (2016) - 157 pages