tammet bleu
 
"A l'intérieur du cerveau extraordinaire d'un savant autiste"
 
Nous avons tous entendu parler d'une maladie appelée syndrome d'Asperger et de l'autisme dont il est une forme. Mais probablement n'en avons-nous qu'une connaissance superficielle et en tout cas intellectuelle. Ce journal d'un porteur de ce syndrome dans sa variété "savant" nous en fait ressentir profondément les conséquences pour la vie de chaque jour. Ce récit est une belle histoire humaine, qui d'ailleurs ici est un succès pour l'auteur qui, non sans difficulté, va réussir à construire une vie indépendante et somme toute, heureuse.  
 
L'Asperger est à la fois privé de certaines sensations (empathie, localisation spatiale, réaction en réseau, etc.) et possède des caractéristiques propres souvent exacerbées : frayeur (face au bruit, à la foule, à la lumière forte), mémoire prodigieuse, perception des détails, besoin d'ordre, synesthésie, etc. N’ayant pas d'empathie pour les autres, il ignore leurs émotions et ne peut pas construire ses actions en en tenant compte. Il est ainsi jugé asocial et se réfugie dans la solitude. Pas de jeux, pas d'échanges, pas d'amis...
 
Mais ses caractéristiques exceptionnelles et les exploits hors-normes, mais parfois un peu vains qu'il accomplit lui réservent souvent une place un peu étrange dans le monde, à l'occasion spectaculaire, mais qui peut servir de marchepied pour des relations plus naturelles. Ce fut le cas de l'auteur qui eut cette chance, construisit peu à peu sa vie d'homme et trouva même un compagnon. Ces actes incroyables (apprendre et réciter pendant 5 heures plus de 22000 décimales du nombre Pi, apprendre l'islandais en une semaine et le parler à la télévision le dernier jour, apprendre par cœur des livres ou des annuaires, etc.) donnent cependant bien peu d'avantages à la vie de chaque jour et risquent de transformer leur auteur en un étrange savant qui étonne, mais qu'on ne comprend pas mieux.
 
C'est dans le récit qu'il nous donne de sa vie, où chaque marche gravie est un triomphe, que réside la force qui nous fait espérer au cours de la lecture que cet homme sur/sous-doué trouve sa voie. Le style factuel, simple et surtout sans emphase est une vraie réussite. Un livre qu'il faut lire pour comprendre ce que signifie une larme quand l’œil est désespérément sec.
 
Les Arènes (2006), 240 pages