larane femmes"Avancées et reculs de l'antiquité à nos jours"
 
En quelques pages, ce petit livre agréablement illustré trace la courbe sinueuse du statut social des femmes dans l'histoire. Notre vision fréquente d'un changement régulier et continu de l'organisation de notre société avec le temps s'avère tout à fait contraire à ce qu'a été la réalité en ce qui concerne les femmes. Elles furent parfois presqu'égales des hommes sur de longues périodes, mais redevinrent des mineures sous autorité masculine à d'autres périodes, comme celles de la Grèce antique, de la Renaissance ou au 19e siècle, par exemple. Un regret : le livre n'aborde pas ce qui est derrière cette inégalité qui a la vie dure. Mais le sait on vraiment ? Ce rappel des faits est déjà beaucoup et fournit amplement matière à réflexion.
 
Je souhaiterais ici faire quelques remarques. Nous avons fait de l'égalité hommes/femmes une évidence incontournable, un impératif, dans nos sociétés occidentales évoluées. Mais cette valeur est récente et fragile, comme le montre le livre. Rappelons par exemple que les femmes n'avaient pas le droit de voter en France il y a 80 ans et qu'une part de la population actuelle (en général sous couvert de religion) ne partage pas le bienfondé de cette égalité, qui d'ailleurs est loin d'être pleinement réalisée.
 
Il est aussi très troublant de constater tout au long du texte que des écrivains, philosophes, hommes politiques, dont la réflexion est souvent de très haute qualité, sont fréquemment emportés par le courant de la pensée officielle quand il s'agit de ce sujet et ont souvent défendu la subordination de la femme à l'homme, sous des prétextes divers. Est-ce à dire que l'égalité est une convention sociale sur les rôles des sexes et non un impératif de l'espèce dont l'évidence ne s'impose pas naturellement ? Il semble également difficile de faire un lien entre les grandes civilisations et leur attitude vis-à-vis de la condition féminine. J'entends d'ici le crissement des poignards jaillissant de leurs fourreaux pour m'assassiner devant de tels propos...
 
Le livre aborde aussi un sujet, plus grave à mes yeux, qui est le déni d'humanité que certaines civilisations ont eu vis-à-vis des femmes, les réduisant à un quasi esclavage. La rareté (relative) de cette situation incite à penser qu'elle heurte notre nature et qu'il s'agit là d'un état social intolérable ce qui le distingue clairement du débat sur l'égalité des rôles. Égalité dont le contenu mériterait d'être défini. Égalité n'est pas identité.
 
Merci donc à ce livre de nous permettre de parcourir simplement l'histoire de cette relation instable entre les deux sexes. Il nous rappelle aussi que tant de progrès et de revers au cours du temps ne nous permettent pas de crier victoire. Bien des civilisations qui couvrent le monde actuel ne partagent pas cet impératif d'égalité sociale hommes/femmes propre au monde occidental qui, lui-même, ne se défend pas toujours avec beaucoup de vigueur. Et, quand une civilisation a cessé d'être là référence, comme le devient notre modèle occidental, ne va-t-on pas à la recherche d'un autre ? Ou d'un dieu, pour qu'enfin la vérité soit établie. Et les dieux, en particulier misogynes, ça ne manque pas.
 
Hérodote . net (2019), 143 pages