L'auteur, écossais, aurait été le modèle du "James Bond" de Ian Flemming. Ce n'est pas surprenant lorsqu'on lit les exploits de ce diplomate-militaire de Sa Majesté, son culot, sa détermination et son incroyable chance au cours de ses missions pendant la guerre de 39-45. Et le séjour diplomatique en URSS en pleine purge ne manque pas non plus de piquant. Mais c'est surtout le récit d'aventures proprement extraordinaires qui fascinera le lecteur.
L'URSS
Le premier chapitre est en effet consacré au choix qu'il fait, comme jeune diplomate, de quitter Paris pour Moscou en 1937, désireux de remplacer les salons feutrés par le terrain. Son choix surprend. L'URSS est en pleine purge stalinienne et son séjour à Moscou lui permettra de juger de la dérive totalitaire du régime et du délire de persécution de ses dirigeants. Son récit est factuel, sans recours aux grands principes, mais donne une vue concrète de ce qui se passe.
Le désir lui vient alors de découvrir les Etats d'Asie Centrale soviétique. Tâche inenvisageable en prenant la voie officielle. Alors, muni de son état de diplomate, de son audace, de son don des langues et de sa capacité à convaincre et à susciter la sympathie, il se lance et il enjambera tous les obstacles pour atteindre en plusieurs voyages ces lieux encore peu fréquentés de la planète. Les situations rocambolesques se succèdent, mais jamais il ne perd espoir, ni le contrôle des événements. Là aussi ses descriptions sont factuelles, sans théorie.
Le Moyen-Orient
Làs de l'univers diplomatique et anxieux d'entrer dans l'action après la déclaration de guerre, il décide de s'engager comme simple soldat et de démissionner du corps diplomatique, non sans mal. Très vite ses qualités sont reconnues et il va plonger au coeur de la guerre. Il est envoyé au Caire pour y lancer le SAS, en charge d'opérations spéciales. Il n'en manque pas, dans des conditions physiques souvent effroyables. Rien ne l'arrête et il sait partager son enthousiasme et son énergie : des qualités du chef. Lisez par exemple le récit de sa tentative de miner le port de Benghazi occupé par les Allemands ou son enlèvement d'un général félon en Perse... Mais il apprend aussi à nouer de précieuses relations politiques et à la fois ses actes et ses analyses prennent du poids.
La Yougoslavie
Sa maturité, ses liens au plus haut niveau en Grande-Bretagne ou avec les alliés, sa capacité à faire advenir l'impossible, vont lui valoir de jouer un rôle clé contre cette base arrière des Allemands. Son analyse est que seuls les "partisans" dirigés par Tito sont fiables, en dépit de leur couleur politique. Il convaincra les alliés de soutenir les troupes des "partisans" par des ravitaillements, des armes et de l'appui aérien, jusqu'à leur succès final. Ce n'est plus seulement l'auteur de coups extraordinaires qui nous séduit, mais surtout l'organisateur, l'homme de négociation, capable de donner forme à ses convictions. Et cela, au coeur d'une Yougoslavie livrée à l'imbroglio politique opaque bien connu des Balkans. Il fallait le faire...
Un très beau livre d'une vie qui conduit un jeune audacieux du "caprice" d'Asie Centrale à la conduite d'un pan de la guerre de 39-45, en passant par l'exercice d'actions de combat périlleuses, mais qui l'ont révélé.
Un roman de formation ?