houellebecq soumission

 

Bien entendu, le contenu de ce roman est une pure fiction ! La force d'âme de notre classe intellectuelle est bien connue, capable de déceler la toxicité des idées fausses : aucun intellectuel français n'aurait toléré le communisme, par exemple, cette machine à oppression et à fabriquer de la misère et du camp de concentration... Sauf que l'histoire nous a prouvé l'inverse. Alors, même si ce récit de la déconfiture veule des "intellectuels" face à un islam d'occasion nous fait bien rire, ajoutons que l'on rit jaune.

 

Ce livre n'est sans doute pas une oeuvre immortelle, mais il porte à notre attention d'une manière enjouée les évolutions récentes de notre civilisation et il joue avec pour nous projeter dans une incroyable (au sens étymologique) aventure politique. Face au FN, le mal absolu, UMP et Socialistes s'unissent à un parti se réclamant de l'Islam qui va profiter de cette position d'arbitre pour poser ses conditions. Elles sont sévères et pour tout dire intolérables, tant au niveau intellectuel que moral. Et le consensus va néanmoins se faire pour les accepter, aidé par des fonds considérables en provenance de l'Arabie Saoudite sunnite.

Le milieu universitaire est particulièrement touché. Sans dévoiler (ce n'est pas un jeu de mots) le contenu du livre, mentionnons par exemple l'arrivée de "l'Université Islamique Paris-Sorbonne" avec toutes les conséquences que l'on peut imaginer. La réaction "apolitique" des universitaires n'est pas de résister, mais de faire confirmer, pour ceux qui restent, leurs avantages... Le portrait du narrateur, professeur d'université, est un chef-d'oeuvre de description du vide. Alors, qu'espérer de ce type de profil ?

En fait, la réaction populaire est généralement la même : confiance évanouie dans les partis traditionnels, dans un pouvoir impuissant, traitant de sujets aussi essentiels que la fessée, l'homosexualité ou le vapotage, société éparpillée, désolidarisée, où chacun fabrique ses propres valeurs. Alors, pourquoi ne pas essayer l'Islam ? En échange d'une soumission à une loi nouvelle, peut-être un peu d'espoir se reformera ? Le profond sentiment d'appartenir à une société sans valeurs partagées, au mieux nostalgique ou au pire, prête à tout, est bien le fond sur lequel ce roman a pu s'écrire. Le succès du FN, d'ailleurs, est là. Hitler avait déjà joué là dessus.

MH ne fait pas d'analyse, il avance une intrigue et je soupçonne qu'il s'est bien amusé en le faisant. Nous aussi en le lisant. Sans plus, car très franchement, on n'y croit pas, même si certains aperçus sont fascinants.

Flammarion (2015) - 320 pages