Un roman passionnant, sans doute autobiographique, sur une Américaine, exilée du Sri Lanka, qui découvre à travers le filtre de sa tradition, pondérée par sa nouvelle existence, l'histoire dramatique de sa famille et celle des révolutions tamoules.
Triple plongée, donc, dans la culture cinghalaise et plus particulièrement tamoule, sur la terrible épopée des Tigres et sur l'exil dont l'impact est d'autant moins anodin que la culture d'origine est forte et structurante de la vie.
Notons au passage la part considérable faite par cette culture que nous connaissons si mal au mariage et la nostalgie qu'éprouve l'auteur face au remplacement de cet événement social de première grandeur par notre piètre mariage occidental. Un beau sujet de réflexion sur nos choix sociaux.
Réflexion nécessaire aussi, avant jugement, sur les engagements révolutionnaires des Tigres, sur leur bel idéal de liberté et d'indépendance et sur la montagne de cadavres qu'ils laissent derrière eux. Fanatiques ? Terroristes ? Patriotes ? Allons donc nous promener sur le Chemin des Dames pour respirer un air pur...
Quant à l'exil, on devrait remercier notre destin quand on en est préservé. L'ordre du monde auquel on a appartenu, auquel, enfant, on a confié son destin, perd sa part d'absolu, sa capacité de salut. Un autre ordre est là, qui ne s'appréhende plus par le coeur ni l'instinct ni la confiance sans bornes que procure l'évidence, mais par l'intelligence et la raison seulement. On peut en mourir. Ce roman, à petites touches, vous le fait comprendre avec beaucoup de sensibilité.
Un très beau livre, pour qui n'a pas la maladie des certitudes, ni de la foi.