Ce livre a été traduit en français sous le titre "Le monde post américain", préfacé par Hubert Védrine.
Après avoir ravi au Royaume-Uni la place de première puissance mondiale, les USA, victimes du succès de leur modèle, voient se lever dans le monde des états puissants et ambitieux, comme l'Inde, la Chine, le Brésil,etc. Comment peuvent (ou doivent)-ils réagir ? Cet excellent essai, écrit par un américain d'origine indienne, donne des pistes.
La position hégémonique fascine. Qui n'a rêvé, quand il en avait (ou croyait en avoir) les moyens, de s'y installer ? La Grèce, Rome, les Empires européens, Napoléon, Hitler, Staline... Avec la même issue que décrit si bien Paul Kennedy dans son livre "The rise and fall of the great powers", un risque de se croire responsable de tout, de tout vouloir faire et contrôler, jusqu'à l'épuisement, souvent conclu par un revers militaire grave. Les USA ne relèvent-ils pas aujourd'hui de ce schéma ?
Non, répond FZ. Certes, le "Reste" (tous ces pays en progrès rapide) impressionne, mais les USA ont une telle puissance, une telle capacité d'adaptation et une telle imagination qu'ils ont les moyens de garder une place majeure dans ce monde nouveau. Place hégémonique, à la Bush fils, dans sa lutte contre "l'axe du mal" ? Certainement pas. Mais une place de "marieur", de "broker" diplomatique dit FZ, nouant les fils, présent partout, partageant une expérience avec ceux qui la souhaitent, sans l'imposer, comme il le fait d'ailleurs déjà à l'appel de certains, comme l'Europe au Kosovo. Encore faut-il que les USA retrouvent une légitimité en partie perdue et s'appuient sur le fait que, pour le monde, ils sont plus qu'une force armée.
FZ souligne les chances et les conditions de succès d'une telle stratégie dans son essai, en notant que le monde actuel, contrairement à celui du passé, est composé d'Etats qui cherchent à s'y intégrer, beaucoup plus que d'Etats messianiques forts d'une "vérité" qui exclut d'autres Etats. Que les réactions extrémistes de certaines factions islamistes ne nous cachent pas l'attente profonde des peuples !
Notons aussi au passage la vision de FZ qui pense la Chine moins stable à terme par sa rigidité centralisée que l'Inde souple et pagailleuse, mais capable d'encaisser de mauvais coups. Ne pourrait-on pas, remarque personnelle, pousser cette comparaison au cas de l'Allemagne et de l'Italie dans notre Europe en bouleversement ?
Cet essai remarquable, l'est peut-être en partie par la posture que peut prendre FZ, à la fois proche des USA (il en est citoyen) et en même temps plus distanciée en raison de son origine indienne. A lire !