djavadi_desorientale
 
 
A travers un récit probablement marqué par sa vie personnelle, ND aborde en les mélangeant, quatre thèmes essentiels. L'Iran, l'exil, l'homosexualité, la famille. L'approche est directe, factuelle, éloignée  de toute théorisation inutile. Cette fraîcheur vaut certificat d'authenticité pour ce qui nous est rapporté et nous le rend infiniment proche.
 
 L'Iran, d'abord. Le roman couvre le 20e siècle iranien qui verra le pays passer de la royauté traditionnelle à l'État islamique actuel en traversant l'épisode tragique et burlesque de l'Empire du Shah, qui, totalement manipulé par les USA, va rater une tentative délirante de transformation de la société. Et quand ce régime comprend qu'il a perdu la main, il tentera au moyen d'une police criminelle de se maintenir. Il fera ainsi le lit d'un clergé chiite qui, dépassé lui aussi, aura en gros le même comportement violent. Le roman montre bien à quel point, devant ces monstres totalitaires, toute contestation est un risque vital, même en dehors des frontières de l'Iran. Et quel esprit un peu ouvert peut accepter ce cauchemar ?
 
Il reste alors l'exil. Mais il existe un gouffre entre l'image rêvée de la France et la réalité, pour ces Iraniens pourchassés. A quoi s'ajoute la découverte de la solitude presque hostile du pays d'accueil. D'autres, comme Stephan Zweig, s'y sont brisés. Le livre nous fait pénétrer avec sensibilité dans ce drame qui frappe de nos jours le monde entier.
 
 Un autre sujet est abordé ici avec la même sensibilité. On peut avoir une large gamme d'opinions sur l'homosexualité, mais j'ai rarement lu quelque chose d'aussi simple et apparemment sincère sur ce thème. Aucune théorie ni référence à des principes, mais une force en soi qui attend une réponse. Bien entendu, aucune n'est définitive...
 
 Et, dans ce maelstrom, il est touchant de voir que brille encore l'espoir d'un futur sous la forme d'un enfant, sans doute la pulsion la plus forte de tout ce qui est vivant. Se reproduire pour que ne soient pas vains les drames vécus ? La famille comme salut ?
 
 Le livre bouillonne : thèmes, nations, destins et rêves sont en interaction permanente, ce qui n'en rend pas toujours le fil limpide. Le style n'aide pas non plus à simplifier les choses. Mais cela ne retire rien à la fascination mélancolique que l'on éprouve à sa lecture. Un très beau roman.
 
Liana Levi (25 août 2016) - 352 pages