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Ce roman policier, à l'intrigue fort originale, peut aussi se lire comme le support d'une réflexion sur un sujet difficile à cerner, la culpabilité, factuelle ou ressentie. Nous sommes cernés par les conséquences de nos actes, de nos choix et de ceux des autres. Alors, ne peut-on pas parfois être coupable par procuration ? Coupable, mais pas responsable ?
 
Tout au long de ce livre, ce sujet affleure. Nous avons donné toute notre confiance à quelqu'un qui se révèle ignoble ? Une souffrance s’installe et nous nous sentons coupables de n'avoir pas mieux conduit notre vie ni protégé ceux que cet être a blessés. Certains de nos actes se sont inscrits dans une éthique irréprochable et pourtant nous souffrons de leur ambiguïté. Et cette culpabilité, lorsqu'elle se révèle, nous nargue et peut parfois empêcher de dormir. Sans oublier des haines effroyables, incarnées ou non, dont nous nous sentons parfois coupables...
 
Tout cela est ici enfoui sous un roman policier bien construit, qui peut se lire avec plaisir, sans faire appel à ces couches profondes, mais discrètes, évoquées ci-dessus. L'originalité de l'intrigue et sa conduite réussie sont en soi la certitude d'un bon moment de lecture. Le tout converge vers une séance de décryptage d'anthologie, dont je crains fort que de nombreux lecteurs, peu férus de probabilité, ratent une ou deux marches. Aucune gravité, d'ailleurs, pour la poursuite du roman. Prenons ce chapitre comme un bonus que l'on peut ou non activer.
 
Le tout, comme le rappelle le titre, se déroule à Aix-en-Provence, ville que l'auteur connaît bien et sait nous faire aimer. Les descriptions des couleurs, des sons, du vent, de la chaleur sont, au fil des pages, un régal. Nous sommes sur le cours Mirabeau, à la Rotonde, sous les platanes d'Aix. Nous parcourons ses rues avec l'auteur qui nous y conduit avec son cœur.
 
Et puis, sous un texte bien écrit, fluide, on pressent que l'auteur laisse filtrer certains événements de sa vie, donnant au récit une marque personnelle forte. Il l'a connu ce Slimane qu'il hait et qui a été un ou plusieurs des personnages qui ont sali son image de l'humanité. Il a été très proche de ce Metzger voyeur, qui l'a dérangé, mais qui, pour autant , ne déclenche pas sa haine. Il a été ébloui par la beauté de ces femmes qu'il met en scène, conscient à la fois du bonheur qu'elles lui donnent et de la culpabilité que provoque ce désir. Comme nous tous...
 
Un très beau roman que l'on peut lire sous plusieurs approches, toujours généreux et humain. Une réussite.
 
Editions Cyrano (2010) - 235 pages