mace scaron horreur"Ce n'est pas le croyant, mais la croyance qui m'effraie, ce n'est pas le religieux, mais la religion qui m'indispose"
 
Voici un essai (ou un pamphlet) au titre explicite, écrit par un athée, convaincu que les religions sont des illusions dangereuses et que les hommes se porteraient mieux s'ils s'en affranchissaient. Dans cet esprit, on peut aussi dire que si l'eau ne coulait pas, il y aurait moins d’inondations... Pour être juste, il me semble pourtant que ce livre est utile, excessif et incomplet.
 
Utile.
 
Si vous êtes convaincu que la démocratie a été un bienfait et  n'a été possible que par l'usage libre de la raison qui optimise et s'adapte, en lieu et place de dogmes, vous souffrez comme moi de la révérence faite aujourd'hui à toutes les croyances. Le livre montre ces excès, aux formes diverses, allant de piscines pour femmes au port du voile par des ministres anglaises. Ces petites lâchetés sont la route de la soumission et il est utile que quelqu'un les dénonce.
Utile aussi lorsqu'il montre le potentiel de haine que cultivent ceux, prosélytes chrétiens, musulmans, hindouistes et autres, lorsqu'ils veulent  que nous baisions le cul de leur dieu, convaincus qu'ils sont de détenir la vérité qui sauvera la planète. La liste des crimes commis en son nom et que le livre détaille est longue et continue.
Utile également pour rappeler que les dogmes "révélés" ont tous été des créations politiques pour rassembler des hommes dispersés. Qui peut croire que des préceptes vieux de plusieurs milliers d'années soient encore fondés ? C'est facile, la révélation, cela évite d'argumenter ce qu'on avance et de suivre l'évolution du monde.
Utile toujours lorsqu'il montre que l'amour dont se gargarisent les vendeurs de religions est un mensonge, un habillage publicitaire que les faits démentent. Sauf, peut-être dans le cas, largement répandu et couvert par la hiérarchie, des pédophiles plus ou moins gradés de nos  institutions religieuses ?
Utile enfin lorsqu'il rappelle qu'entre religion et raison n'existe aucun pont, sauf pour quelques gourous en mal de clientèle.
 
Excessif
 
Que les religions ne méritent pas le respect qu'on leur voue de nos jours me semble entendu et leur nocivité doit être contrôlée à chaque instant. Il ne peut pas y avoir d'Etat dans l'Etat.
Pour autant, le parti du livre qui est de dénoncer, passe sous silence ce que des hommes ont fait de positif, au nom de cette illusion. Solidarité, éducation (n'en déplaise à l'auteur), mécénat, par exemple. Les religions ont aussi posé des règles simples, indiscutables, pour aider les hommes à vivre ensemble, ce qui est un art bien difficile ! Que dans le passé et encore aujourd'hui en certains lieux, les dogmes aient fourni aux hommes un pivot à leur unité est incontestable. Le problème est qu'aujourd'hui dans les pays développés démocratiques, une autre façon de faire la loi est en place et que la religion ne peut ni ne doit y interférer, puisqu'elle prétend ses dogmes indiscutables. 
 
Incomplet
 
Oui, les religions sont des foyers de haine, de crimes, de mensonges. Mais quand on les éradique et que l'on tue la démocratie, on recrée immédiatement d'autres dogmes, la race chez les nazis, le prolétaire chez les totalitaires marxistes et on aligne les morts, les privations, le triomphe des serviles, les guerres et la misère. Paradoxe ? Sans doute pas. Je pense profondément que l'homme a dans ses gènes une attente, que l'exercice libre de la raison et du compromis ne remplit pas. La démocratie aussi a ses dogmes : la sagesse cachée du peuple, par exemple, dogme que personne ne discute. Ainsi, elle fonctionne, car c'est un bon dogme. Celui du prolétaire ou de la race étaient mauvais et ont conduit à la débâcle sanglante. Alors, il ne suffit pas de chasser les religions ; il faut savoir ce qui les remplace. Le livre est bien silencieux sur ce point. Démocratie et religion sont et resteront en conflit, par exemple. Pour avoir la paix, il faut un vainqueur et c'est dans nos contrées la démocratie. A condition qu'elle le reste et sache réduire la religion au silence des espoirs fous des hommes, chez eux, au fond d'eux-mêmes, toutes portes fermées. Et laissons au fond des tiroirs secrets ces masques que sont les kippas, croix, voiles et autres, étalages à la fois d'orgueil dérisoire et sans fondement et pour moi, de sottise satisfaite.
 
Tribune libre Plon (2016) 198 pages