cornu nouvelles technologies

 

Ce livre est, avant tout, "un beau voyage au pays des technologies" avec la double volonté de faire plus que contempler les faits et de tenter d'en maîtriser la complexité et les interrelations. L'espoir de JMC est alors qu'une telle vision globale, "cartographiée", des technologies nous aidera à mieux procéder à nos choix, choix livrés pour l'instant à la loi du plus fort et aux idéologies réductrices.

La lecture de ce livre s'adresse à ceux que, au moins, la technologie intéresse ou préoccupe, et qui, si possible, ont une culture scientifique minimale. Sachant qu'il est plus facile de se prendre pour la conscience de l'humanité que de comprendre les fonctionnalités des protéines, l'inverse étant, à mon avis, préférable, ce livre en contribuant à ce noble but, me parait fort bien venu. Encore faut-il faire l'effort de le lire et peut-être de le relire.

 

Il fait ainsi le point actuel de quatre secteurs clés des techniques en évolution rapide :
- Nanotechnologies
- Biotechnologies
- Informatique et réseaux
- Neurosciences
Cette partie du livre est remarquable et donne assez rapidement une image de ce qui se prépare dans ces secteurs si vivants. Qui peut, à notre époque, prétendre s'intéresser à l'avenir des hommes et ignorer cela ? Hélas, plus d'un, si j'en crois mes expériences personnelles, influencées par une formation scientifique.
Au passage, il me semble utile de signaler le livre récent "Jean-Pierre Changeux - Du vrai, du beau, du bien" qui permet d'approfondir notre compréhension des neurosciences.

JMC insère aussi entre les chapitres, une réflexion sur les mécanismes de la pensée des hommes, confrontés à cet accroissement proprement explosif de leur pouvoir sur le monde et donc sur eux-mêmes. Ce faisant, il s'engage d'ailleurs dans une certaine normativité, basée sur la maîtrise de la complexité et sur les techniques y aidant. J'avoue rester perplexe. Veut-il ainsi mieux approfondir les mécanismes de la découverte ou bien, je dirais presque au contraire, élaborer un mode de pensée (la "pensée-2"), susceptible d'aider les décisions "éthiques" dans ces domaines ? Et est-ce vraiment (allez, un peu de mauvais esprit...) en s'appuyant sur "l'empan mnésique du calepin visuo-spatial" que nous ferons quelques progrès ? Pour avoir lu Paul Feyerabend (Adieu la raison, Dialogues sur la connaissance et Tuer le temps) et en dépit de l'admiration que j'ai pour son intelligence pleine d'humour, je n'attends qu'assez peu de ces considérations "cognitives" terriblement autocentrées et un peu trop "jargonesques" à mon goût.

Un autre point m'a semblé absent de cette réflexion. On ne peut, bien entendu pas tout traiter en un seul livre, mais il me semble que le développement du savoir, qui conduit aux technologies en question, est mu par quelque chose de fondamental en l'homme et qui n'est pas abordé dans ce livre : l'envie de comprendre le monde et pas seulement d'agir sur lui. Et si on accepte l'axiome, jusqu'ici toujours vérifié, que tout ce que le savoir permet à l'homme de faire, il le fait un jour ou l'autre, alors il me semble qu'il est urgent d'agir à ce niveau de la pulsion de savoir et pas seulement à celui de l'exécution technique. Vaste chantier !

Ceci posé, ne boudons pas notre plaisir devant ce livre intelligent et si utile. Je suis ravi à cette occasion d'avoir découvert la FING, dont JMC est le directeur scientifique et je vous convie à faire la même découverte que moi.

 

fyp (2008) - 336 pages