Le style de BD est direct, simple, construit sur des phases courtes, tournées vers l'action. Cela rend la lecture du roman agréable, même si le sujet (l'obéissance à des ordres inhumains) n'est pas fait pour l'être.
C'est, au fond, un roman sur la "banalité du mal", pour reprendre une expression qui a eu un certain succès. Le mal, ici, est la complaisance du "héros" à son métier de policier politique, qui attend de lui des actes départis d'humanité.
DD montre bien comment, du jeune juriste, va peu à peu naître le policier sans âme, machine de précision au service d'idéologies successives. Car il servira aussi bien la France de Pétain que celle de De Gaulle, et finira sa carrière dans les honneurs.
Il n'est d'ailleurs pas un cas unique et les portraits qui traversent le livre valent à eux seuls sa lecture. Certes, il s'agit d'une fiction et non d'un livre d'histoire. Il est cependant permis de supposer, au vu de la documentation qui a servi de référence, que l'histoire réelle ne doit pas être bien différente.
Au-delà du roman, agréable à lire et qui contribue à éclairer une époque (deux, devrais-je dire...), se pose bien entendu la question de fond : qu'aurions-nous fait à la place de ce salaud ordinaire ? Le mythe de l'homme naturellement bon me parait un idéalisme dangereux et il est bien difficile de ne jamais hurler avec les loups. Cela ne suffit certes pas à bâtir une éthique, mais ne jugeons pas trop vite. Bien et mal ? N'est-ce pas souvent l'un qui fait naître l'autre ? C'est la maitrise de leur équilibre qu'il faut atteindre, plutôt que se voiler la face ou se payer de mots. Comme en beaucoup de choses, l'excès est le pire danger et c'est surtout de cela qu'il faut savoir se garder.
Une lecture très intéressante.