Natsume Soseki (1867-1916) est, à mes yeux, un des plus grands écrivains japonais, de la génération de ceux qui vivaient l'incroyable et traumatisante ouverture volontaire du Japon au monde occidental et à ses valeurs, en essayant de ne pas renier les leurs. Il me semble d'ailleurs que ce roman difficile, où le héros vit une sorte de dispersion des éléments de son moi, est une image symbolique du Japon d'alors, commettant à la fois le suicide de sa "japonité" et l'initiation à un monde nouveau, à l'efficacité dure et cruelle. nat
Le héros, jeune, sans nom, fuit. Il est immature, sans expérience des hommes. Comme le Japon d'alors, il ne veut plus être ce qu'il est. Ce qui faisait sa cohérence, il le récuse sans appel. Il se jette alors dans un monde parcellaire, absurde comme un roman de Kafka, convaincu qu'il doit mourir pour assurer son salut, sa rédemption.
Il sera servi au-delà de ses espérances par ses rencontres d'êtres infâmes et de situations angoissantes. Mais il avait vu juste : de l'humanité de quelques-uns et de sa persévérance, viendra sa réhabilitation. Son initiation est un succès, comme sera celui du Japon à l'Occident.
Ce roman n'est pas à proprement parler un récit, mais plutôt un long monologue. C'est une méditation sur notre fragilité, sur la faible cohérence de notre pensée, si peu ferme qu'elle est ouverte à toutes les erreurs et, comme le disait La Boétie, à toutes les servitudes. Le héros aura son lot de souffrance et d'humiliation en retour. La description de la vie à la mine et de la mine elle-même est un chef d'oeuvre symbolique de cette déchéance rédemptrice. Mais cette faiblesse est essentielle pour notre initiation, notre progrès. Paradoxe...
Il faut le talent de NS pour que ce noir roman ne sombre pas. Seul un écrivain exceptionnel peut écrire ces 300 pages au bord du désespoir et presque sans intrigue, sans angoisser mortellement ses lecteurs. Il faut aussi être japonais et donc un peu bouddhiste de culture, pour montrer avec autant de talent la non-existence d'un "moi" qui nous serait donné. Mais NS concède que l'homme peut s'en construire un, provisoire au moins, comme fruit de sa volonté. Le lien est là, prémonitoire, avec notre culture. L'initiation est faite.
Le héros, jeune, sans nom, fuit. Il est immature, sans expérience des hommes. Comme le Japon d'alors, il ne veut plus être ce qu'il est. Ce qui faisait sa cohérence, il le récuse sans appel. Il se jette alors dans un monde parcellaire, absurde comme un roman de Kafka, convaincu qu'il doit mourir pour assurer son salut, sa rédemption.
Il sera servi au-delà de ses espérances par ses rencontres d'êtres infâmes et de situations angoissantes. Mais il avait vu juste : de l'humanité de quelques-uns et de sa persévérance, viendra sa réhabilitation. Son initiation est un succès, comme sera celui du Japon à l'Occident.
Ce roman n'est pas à proprement parler un récit, mais plutôt un long monologue. C'est une méditation sur notre fragilité, sur la faible cohérence de notre pensée, si peu ferme qu'elle est ouverte à toutes les erreurs et, comme le disait La Boétie, à toutes les servitudes. Le héros aura son lot de souffrance et d'humiliation en retour. La description de la vie à la mine et de la mine elle-même est un chef d'oeuvre symbolique de cette déchéance rédemptrice. Mais cette faiblesse est essentielle pour notre initiation, notre progrès. Paradoxe...
Il faut le talent de NS pour que ce noir roman ne sombre pas. Seul un écrivain exceptionnel peut écrire ces 300 pages au bord du désespoir et presque sans intrigue, sans angoisser mortellement ses lecteurs. Il faut aussi être japonais et donc un peu bouddhiste de culture, pour montrer avec autant de talent la non-existence d'un "moi" qui nous serait donné. Mais NS concède que l'homme peut s'en construire un, provisoire au moins, comme fruit de sa volonté. Le lien est là, prémonitoire, avec notre culture. L'initiation est faite.
Editions Le Serpent à Plumes (2000) - 300 pages