borjesson blackVous et moi avons l'image que la presse américaine est libre et joue son rôle de quatrième pouvoir politique. Non ? La lecture de ce livre est urgente et nous conduit à modérer cet à priori. Car, s'il y a des domaines et des circonstances où cette liberté s'affirme, il en est par contre d'autres où elle est censurée.

Des journalistes qui croyaient à leur métier témoignent ici de ce qu'ils ont vécu quand ils ont découvert qu'il y a des des pouvoirs qu'ils n'ont pas le droit de soumettre à leurs enquêtes. Qu'ils n'ont pas le droit, par exemple, de dire que la CIA contrôle une part aussi importante du trafic de drogue que le cartel de Medellin, ou que certains laboratoires vétérinaires propagent sciemment des produits probablement cancérigènes, ni que c'est sans doute l'armée US qui a descendu un avion de ligne par erreur..

Ce livre recueille 15 témoignages qui font frémir, d'abord par ce qu'ils révèlent, mais aussi et surtout parce qu'ils font craindre que, derrière un travail de simple propagande en faveur de l'ordre etabli pour assurer ses profits, la presse, tenue par l'obligation de résultats financiers, n'ait plus le pouvoir de révéler ce qu'une démocratie attend d'elle. Et cela non parce que les journalistes sont mauvais ou que certains sont vendus, mais parce que le système même qui régit cette profession ne peut plus fonctionner équitablement et conduit à une autocensure des journalistes à laquelle ils ne peuvent échapper sans être broyés.

Faisons quand même la part à l'amertume d'hommes et de femmes écartés de la voie royale de leur profession. Ne négligeons quand même pas leur avertissement qu'une démocratie sans une presse libre ... n'en est plus une !
 
Editions 10/18 No 3720 - 443 pages