J'ai fondu en lisant ce livre si simple et si doux. Comme dans une caresse, il nous parle de la vie bien pleine, mais riche en petits plaisirs, d'une Japonaise emmaillotée dans ses coutumes et ses interdits. Mais ce qu'il nous raconte est autant universel que japonais, car toujours profondément humain. Ici, Hatoko ne recherche pas les grandes émotions, mais trouve sa plénitude et l'équilibre de sa vie dans la contemplation des fleurs ou dans la dégustation d'un petit gâteau ou d'un thé. Elle nous fait partager tout cela, nous disant qu'une sérénité heureuse est à notre portée, toute d'exécution bienveillante et harmonieuse des actes de la vie.

 

Bien entendu, ce livre est d'abord japonais et nous plonge dans cette culture qui a et aura toujours bien du mal à tolérer l'étranger qui ignore nombre de ses subtilités. L'histoire est celle d'une femme, Hatoko, qui tient une papeterie qu'elle a héritée et qui devient écrivaine publique. Tâche délicate qui l'oblige à se fondre dans le problème de son client, souvent dérouté par ce problème, et à mettre par écrit la proposition qui répond à son inquiétude, mais aussi convainc son interlocuteur. L'auteur cite parfois Soseki et c'est en effet souvent à lui qu'il fait penser. Même description pleine d'humour de la vie quotidienne, des modes d'échange des Japonais, de leurs conventions sociales encore si vivantes, de leur réserve dans leurs relations. On peut comprendre qu'un Occidental se sente dérouté dans cet univers qui a imprégné la formation de tout un peuple ! Et l'on y découvre en même temps une culture sociale partagée qui assure une identité encore forte. Dans ce roman, c'est souvent, mais pas seulement, l'amour qui doit s'exprimer, jouant avec la sensibilité de Hatoko. Là aussi, ce qu'elle jette sur le papier est profondément japonais et procède toujours d'une relation humaine respectueuse.

Le roman se fonde aussi sur une autre histoire, touchante, celle de la grand-mère chez qui Hatoko a été élevée et qui a eu, tout au long de sa vie, un amour caché qui va être découvert. Cette relation a donné lieu à un échange de courrier amoureux que Hatoko va lire avec une émotion contenue. Et pour que cette relation interdite reste ignorée du monde, elle procédera à une destruction par le feu de ces lettres compromettantes, au cours d'un rituel shintoïste. Pas la poubelle, le feu et un rituel ! Nous sommes bien au Japon.

N'hésitez pas à ouvrir ce livre merveilleux, si chargé d'humanité bienveillante et d'une conception du déroulement de notre vie empreinte d'une ouverture positive au présent, dont il convient de savourer le passage, seul ou en compagnie de nos proches. Un très beau livre !

Éditions Picquier (2023), 398 pages