reverdy hiver
 
Ce bref roman m'a enchanté, qui met en abyme des destins et des caractères issus d'un large éventail. Et qui le fait dans une Grande-Bretagne déboussolée, au bord de l'abîme des années 1978/1979 où la Dame de Fer allait prendre le pouvoir, remettre de l'ordre, mais ouvrir son pays à la rage mondialiste. Le pouvoir ? Shakespeare a tout dit de son emploi, de la fascination qu'il exerce et de sa violence. Et Shakespeare, avec son Richard III, nous accompagne tout au long de ce voyage. Un bon guide, n'est-ce pas ?
 
Le titre du roman est la première phrase prononcée par Richard III. C'est bien sûr le mécontentement du peuple qui fait référence. C'est aussi celui de destins particuliers qui ne s'épanouissent pas et qui peut-être, eux aussi, seront fascinés par la violence et son ivresse qui délivre de l'échec. Ou qui, au contraire, fuiront, ou, pire, caresseront l'idée de la mort comme remède.
 
Ce qui me séduit particulièrement dans ce roman est d'avoir su combiner une trame romanesque bien construite et ce jeu de miroir entre des personnages différents, réels ou littéraires. Loin de ralentir l'intrigue, ces mises en parallèle des destins permettent, par référence, de les approfondir, de les faire "miroiter" en quelque sorte. Et cela se fait par touches discrètes, sans intention systématique. A tel point que j'ai eu parfois la tentation de pousser moi-même la recherche de relations que les situations suggèrent sans que le texte les propose explicitement.
 
Pour ceux que ces jeux d'évocations imbriquées ne font pas rêver, précisons que le roman peut être aussi lu directement et qu'il est de qualité. Une évocation de ce monde finissant du travaillisme anglais épuisé, débordé et déserté par l'espoir. Un monde que M. Thatcher remplacera, après un instant d'espoir éblouissant, par un monde aussi terne et gris que le précédent. Merveilleuse image que propose le roman, d'une nuit qui, avant de céder la place au jour triste et sombre, passe quelques instants par  la gloire d'un lever de soleil resplendissant. Encore une correspondance...
 
Flammarion 2018, 220 pages