L'auteur est pianiste, mais les oeuvres citées montrent que l'on parle de musique, bien au-delà du répertoire pianistique. Un petit regret, au passage, celui de ne voir évoquée que très modestement la musique "baroque" (1600 à 1750) qui est, justement, une voie d'entrée royale à la musique tout court par sa volonté mélodique et peut-être surtout par ses rythmes, si souvent proches de la danse et donc du corps. Cela traduit sans doute l'honnêteté de l'auteur qui ne se sent pas aussi familier de cette période que de celles qui ont suivi. C'est donc surtout de musique romantique et du 20e siècle que l'on parlera, toujours avec pertinence et sans pédanterie savante. Je reconnais que le champ parcouru est immense et la lecture de ce livre m'a donné le goût de retrouver mille souvenirs d'oeuvres entendues, mais un peu oubliées. J'en ai pour des mois...

 

C'est d'ailleurs un des charmes de ce livre que d'avoir une liste d'oeuvres qui ont à différents titres été des références pour une grande musicienne. On est souvent à la recherche d'une oeuvre à écouter, recherche trop souvent bornée par la lecture des revues et donc un peu par l'actualité de l'enregistrement. Rien de tel ici, où le choix est musical et est commenté. Une aubaine !

 

Le livre va évoluer entre biographie et essai sur l'émotion procurée par la musique et son partage. Les biographies de musiciens ayant atteint le sommet sont passionnantes, en ce qu'on y trouve toujours un mélange unique de dons, de travail et de chance. Jamais ces trois ingrédients ne se répartissent la tâche de la même façon et si l'un manque, le résultat est compromis.

Du début à la fin du livre, des oeuvres vont être mentionnées, commentées, parce qu'elles sont toujours la face concrète des propos tenus. Il est passionnant d'écouter ces oeuvres pour apprécier le propos de l'auteur, chose rendue facile maintenant par les abonnements en "streaming" (comme celui de Qobuz dans mon cas).

 

Ce que j'ai trouvé ici particulièrement original et sympathique est la part que le livre consacre à l'aspect social et à la responsabilité du musicien tels que l'auteur les conçoit. Partager au concert, ouvrir des jeunes à la musique, enseigner et consacrer à tout cela du temps et des efforts est pour CMLG une obligation morale. J'y suis d'autant plus sensible que je sais combien ce métier de concertiste de haut niveau est dur, combien la lutte pour rester audible est âpre et conduit souvent à un égoïsme de "survie". Bravo !

 

Et j'ai aussi été sensible au ton modeste, au style simple et sans esbroufe pratiqué ici, tant dans les propos sur la musique que dans ceux qui concernent son partage ou la carrière de CMLG. On ne peut qu'en inférer qu'ils ont été tenus par une personne de qualité, dont la rencontre ici est un réel plaisir !

 

Flammarion (2018), 211 pages

 

 

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