suter ami
 
MS nous livre encore un de ces cocktails bien à lui, fort et doux, que l'on déguste en attendant le prochain. Ses thèmes favoris sont à nouveau présents (cf : La face cachée de la lune ou Small World) : la perte d'identité d'un être, qui en souffre, et qui va consacrer son énergie à rassembler les morceaux de son moi dispersé et inquiétant. Et qui constatera qu'il n'y a peut-être pas qu'un moi, mais plusieurs, qui se recouvrent et se pénètrent. Et qui constatera aussi que l'oubli est parfois nécessaire.

Ici, c'est un choc à la suite d'une dispute qui aura créé une amnésie lourde. Peu à peu, comme le dit joliment MS, des îlots de mémoire vont émerger de l'océan d'oubli. Tout au long de cette quête nous rencontrons des personnages , bouées ou boulets, toujours bien dessinés et crédibles. MS, comme dans Small World, fait au passage un bien vilain portrait du monde industriel, portrait plutôt caricatural. Un compte à régler ?

Une remarque, en passant. Tant que le personnage principal se contente de la réalité telle qu'elle se révèle à chaque instant, il nage dans l'illusion. Ce sont les références acquises dans sa vie passée qui lui donnent la mesure des choses. N'en est-il pas de même pour nous tous, à chaque instant, qui avons souvent envie de trouver des "vérités" absolues, immédiates et éternelles ?

L'intrigue est en tous cas remarquablement menée, certes un peu embrouillée parfois, mais efficace. Le lecteur a envie de tourner la page suivante pour comprendre.

Encore un très beau livre !
 
Editions Points P1118 (2002) - 373 pages