"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
Fiches de lectures, critiques de livres, personnelles et subjectives !
Inscrivez-vous ici pour recevoir l'annonce des nouvelles fiches de lectures
- Détails
- By livres-et-lectures.com
La visite récente de la maison de Pierre Loti à Rochefort m'avait donné envie de lire quelques items de la production de cet homme d'une originalité et d'une liberté rares. Ses voyages en Asie dans des circonstances exceptionnelles m'avaient guidé dans le choix de ce récit de voyage en Chine. Je ne suis pas déçu !
Fin 1900, les "alliés" de l'époque, c'est à dire tous les occidentaux valides et disposant d'une capacité de présence militaire envoient à Pékin un corps expéditionnaire pour mettre un terme à la révolte des "Boxeurs" qui fut brève mais effroyable. Cette secte chinoise fut une réaction nationaliste, engendrée par la décadence de l'empire mandchou, mais issue plus profondément d'une réaction à l'envahissement de la Chine par ces mêmes alliés colonisateurs et prosélytes. Sa mise hors d'état de nuire fut l'occasion rêvée d'envahir sans plus de retenue ce pays à la décadence avancée et d'ailleurs bien préparée par la colonisation anglaise dont la guerre de l'opium fut une des faces ignobles.
Quoi qu'il en soit, PL se retrouve membre de la délégation française et son récit se lit comme un carnet de voyage. Mais pas comme n'importe quel carnet relatant des moments particuliers ou amusants ou même parfois émouvants. On a tout cela, bien sûr, mais le bonus, ici, est la sensibilité exceptionnelle de notre homme. Si vous avez traîné vos basques à Pékin (Beijin, voyons !) vous retrouverez ses briques grises, sa poussière, sa vie et plus encore. C'est un vrai 3 D ! Mais surtout nous assistons à l'arrivée d'un des tous premiers occidentaux dans le coeur de la Cité Interdite, la résidence impériale. Il décrit magistralement ici le sentiment complexe qu'il éprouve devant une civilisation qu'il ne comprend pas mais dont il perçoit la grandeur dans une rupture totale avec la nôtre. C'est un enchantement. Nous en savons aujourd'hui un peu plus sur ce monde (je parle pour ceux qui ont fait l'effort de le découvrir) et certaines remarques, telles celles sur les monstres griffus et cornus, peuvent faire sourire. Restons-en par exemple, pour notre plaisir, à ses descriptions du soir qui descend sur les toits de tuiles vernissées des palais et à ces fêtes naïves qui veulent chasser la mort.
Car derrière la description éblouie de cet univers chinois improbable, PL revient sans cesse tourner ses regards pleins d'une vraie compassion vers les victimes des horreurs de cette guerre finissante et dont les traces se voient et se sentent.
Sauf à ne pas m'avoir lu jusqu'ici, vous avez compris mon enthousiasme, qui aurait encore été plus vif si j'avais trouvé, au moins entre les lignes, un peu plus de discernement politique. Mais était-ce possible, si loin de nos bases et en 1900, à la veille de notre boucherie européenne ?
Fin 1900, les "alliés" de l'époque, c'est à dire tous les occidentaux valides et disposant d'une capacité de présence militaire envoient à Pékin un corps expéditionnaire pour mettre un terme à la révolte des "Boxeurs" qui fut brève mais effroyable. Cette secte chinoise fut une réaction nationaliste, engendrée par la décadence de l'empire mandchou, mais issue plus profondément d'une réaction à l'envahissement de la Chine par ces mêmes alliés colonisateurs et prosélytes. Sa mise hors d'état de nuire fut l'occasion rêvée d'envahir sans plus de retenue ce pays à la décadence avancée et d'ailleurs bien préparée par la colonisation anglaise dont la guerre de l'opium fut une des faces ignobles.
Quoi qu'il en soit, PL se retrouve membre de la délégation française et son récit se lit comme un carnet de voyage. Mais pas comme n'importe quel carnet relatant des moments particuliers ou amusants ou même parfois émouvants. On a tout cela, bien sûr, mais le bonus, ici, est la sensibilité exceptionnelle de notre homme. Si vous avez traîné vos basques à Pékin (Beijin, voyons !) vous retrouverez ses briques grises, sa poussière, sa vie et plus encore. C'est un vrai 3 D ! Mais surtout nous assistons à l'arrivée d'un des tous premiers occidentaux dans le coeur de la Cité Interdite, la résidence impériale. Il décrit magistralement ici le sentiment complexe qu'il éprouve devant une civilisation qu'il ne comprend pas mais dont il perçoit la grandeur dans une rupture totale avec la nôtre. C'est un enchantement. Nous en savons aujourd'hui un peu plus sur ce monde (je parle pour ceux qui ont fait l'effort de le découvrir) et certaines remarques, telles celles sur les monstres griffus et cornus, peuvent faire sourire. Restons-en par exemple, pour notre plaisir, à ses descriptions du soir qui descend sur les toits de tuiles vernissées des palais et à ces fêtes naïves qui veulent chasser la mort.
Car derrière la description éblouie de cet univers chinois improbable, PL revient sans cesse tourner ses regards pleins d'une vraie compassion vers les victimes des horreurs de cette guerre finissante et dont les traces se voient et se sentent.
Sauf à ne pas m'avoir lu jusqu'ici, vous avez compris mon enthousiasme, qui aurait encore été plus vif si j'avais trouvé, au moins entre les lignes, un peu plus de discernement politique. Mais était-ce possible, si loin de nos bases et en 1900, à la veille de notre boucherie européenne ?
Editions KailasH (1997) - 231 pages
- Détails
- By livres-et-lectures.com
Je ne suis pas entré dans ce roman, pourtant sympathique par sa pudeur devant le sort de prisonnières politiques mineures et sa description vécue et sensible du Vietnam.
Un drame est le choc entre un destin et une volonté. Ici, rien de cela. Tout coule par petites touches, avec parfois même un peu d'affectation dans une simplicité forcée à laquelle il est difficile de croire. Ce qui est un drame se réduit à une aventure, certes intéressante et écrite avec talent, mais à peu près aussi émouvante que le passage d'un train. Et le drame étant absent, le style volontairement confus (retours et involutions) n'ajoute rien à une tension absente.
Peut-être sommes-nous saturés d'horreurs pour ne plus ressentir le charme d'une voix discrète ? Ce qu'on attend, pour le moins, et qu'on ne trouve pas ici, serait un effort de l'auteur pour faire comprendre, expliquer, faire partager. Est-il tellement étrange que des individus qui participent, même de loin, à des attentats soient arrêtés, indépendamment des cruautés injustifiables subies par ces enfants ? Qui les y avait amenés ? Que défendaient-ils ? Pas un mot. Trop d'innocence tue.
Un livre qui flotte avec élégance sur des faits mais n'apporte pas grand chose.
Un drame est le choc entre un destin et une volonté. Ici, rien de cela. Tout coule par petites touches, avec parfois même un peu d'affectation dans une simplicité forcée à laquelle il est difficile de croire. Ce qui est un drame se réduit à une aventure, certes intéressante et écrite avec talent, mais à peu près aussi émouvante que le passage d'un train. Et le drame étant absent, le style volontairement confus (retours et involutions) n'ajoute rien à une tension absente.
Peut-être sommes-nous saturés d'horreurs pour ne plus ressentir le charme d'une voix discrète ? Ce qu'on attend, pour le moins, et qu'on ne trouve pas ici, serait un effort de l'auteur pour faire comprendre, expliquer, faire partager. Est-il tellement étrange que des individus qui participent, même de loin, à des attentats soient arrêtés, indépendamment des cruautés injustifiables subies par ces enfants ? Qui les y avait amenés ? Que défendaient-ils ? Pas un mot. Trop d'innocence tue.
Un livre qui flotte avec élégance sur des faits mais n'apporte pas grand chose.
Editions Gallimard (2004) - 180 pages
- Détails
- By livres-et-lectures.com
La beauté ou l'intérêt de quelque chose ou de quelqu'un est souvent autant dans le regard qu'on lui porte que dans l'objet lui même. Il en va ainsi pour ce livre, classé à juste titre "Série Noire" de Gallimard, mais qui est aussi un vrai roman.
On peut le lire comme un policier classique et y trouver son plaisir. Il est bien ficelé, l'intrigue est solide tient le lecteur jusqu'au bout. Un polard de base, quoi.
Mais c'est aussi un roman qui, comme tous les romans, vaut en grande partie pour ce qu'il évoque en nous de souvenirs, d'expériences, d'illusions et de désillusions. Notre héros est ici un homme juste qui a perdu confiance dans ses institutions et particulièrement celles de la justice. Ce n'est pas le héros américain qui, en attente d'institutions stables, fait la justice lui même. C'est au contraire un vieux routard désillusionné qui croit encore que la justice est un devoir des hommes et qui sait que ses institutions n'en ont plus le pouvoir. Une vraie maladie de notre époque, même aujourd'hui en Amérique, qui dévalorise peu à peu les institutions au profit de l'action directe, avec ce qu'elle a de passionné, de retour à la bête violente, égoïste et injuste. Des petits "Bovés" en sorte. Les institutions récoltent sans doute ce que leur laxisme a semé.
Ce roman aborde aussi un thème qui m'est cher, celui du caractère indiscernable essentiel du bien et du mal. Même si une ne vie ne se construit qu'en triant sans cesse le bien du mal, il n'est jamais possible de faire l'un sans l'autre, un peu. Et surtout, il n'est pas possible de ne pas en souffrir, ou tout au moins de ne pas avoir le sentiment de l'inachevé, de l'inabouti. C'est peut-être une bonne leçon de sagesse ?
On peut le lire comme un policier classique et y trouver son plaisir. Il est bien ficelé, l'intrigue est solide tient le lecteur jusqu'au bout. Un polard de base, quoi.
Mais c'est aussi un roman qui, comme tous les romans, vaut en grande partie pour ce qu'il évoque en nous de souvenirs, d'expériences, d'illusions et de désillusions. Notre héros est ici un homme juste qui a perdu confiance dans ses institutions et particulièrement celles de la justice. Ce n'est pas le héros américain qui, en attente d'institutions stables, fait la justice lui même. C'est au contraire un vieux routard désillusionné qui croit encore que la justice est un devoir des hommes et qui sait que ses institutions n'en ont plus le pouvoir. Une vraie maladie de notre époque, même aujourd'hui en Amérique, qui dévalorise peu à peu les institutions au profit de l'action directe, avec ce qu'elle a de passionné, de retour à la bête violente, égoïste et injuste. Des petits "Bovés" en sorte. Les institutions récoltent sans doute ce que leur laxisme a semé.
Ce roman aborde aussi un thème qui m'est cher, celui du caractère indiscernable essentiel du bien et du mal. Même si une ne vie ne se construit qu'en triant sans cesse le bien du mal, il n'est jamais possible de faire l'un sans l'autre, un peu. Et surtout, il n'est pas possible de ne pas en souffrir, ou tout au moins de ne pas avoir le sentiment de l'inachevé, de l'inabouti. C'est peut-être une bonne leçon de sagesse ?
Editions "Série Noire" de Gallimard - 280 pages
Page 263 sur 314