"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
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L'auteur livre ici à la fois un roman sur la vie mouvementée du compositeur Alessandro Stradella (1644, 1682), une autobiographie partielle, ses réflexions sur la musique et la composition et sur l'art d'écrire. Nul ne pouvait, mieux que lui, réussir un tel pari !
Les grandes lignes de la vie de Stradella sont connues, ainsi que ses oeuvres musicales, mais cela n'aurait peut-être pas suffi au contenu d'un roman. Ce que l'on en sait, néanmoins, est plein de feu et de flammes, incendies souvent allumés par un beau visage ou le velours d'une voix de femme. PhB en profite pour nous entraîner dans le sillage des frasques de Stradella, frasques qui lui vaudront la vengeance d'un sénateur de Venise et la mort.
Mais, cette vie sous tension, conduite par l'émotion, est, comme nous le rappelle Phb, un carburant essentiel à la composition musicale. L'originalité profonde de ce livre est sans doute là : comment une vie devient-elle musique, comment un compositeur ressent-il ses émotions, ses souffrances ou son plaisir et en fait-il une oeuvre musicale capable de partage avec ceux qui savent écouter et qui y retrouvent leur propre vie ? PhB a là dessus des perspectives passionnantes.
Il en profite pour se poser la question parallèle de la genèse d'un roman en prenant en lui-même la matière de sa thèse. Je peux bien écrire ceci ou cela sur Stradella, ou Ortensia, ou Gemelli, ou qui vous voulez, vrai ou pas (d'ailleurs le sait-on ?), si le résultat est plausible et plaisant ! C'est un roman, n'est-ce pas ? PhB ne manque ni d'inspiration, ni d'humour et le charme opère, en dépit, parfois, de dissertations un peu étirées.
Un livre original que seules, la culture et l'expérience musicale de l'auteur pouvaient conduire au succès.
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L'histoire, d'abord. Nous vivons une journée "normale" du Roi-Soleil, du petit matin au coucher. Rien ne se passe qui ne soit l'objet d'un protocole issu d'une tradition liée à la fonction et à la représentation publique de cette fonction. Mais, phénomène en grande partie oublié, cette fonction s'inscrit au coeur d'une société elle aussi structurée à l'extrême dans un système de représentations des classes et des fonctions. Notons au passage que le Valet de chambre-tapissier, Monsieur Molière assiste de droit à des moments privilégiés de la vie du roi qu'il serait impensable de faire partager à d'autres fonctions, comme celles de ministre-secrétaire !
Il y a donc à cette époque en chaque personnage une double identité : celle qui lui est assignée par une position sociale, et celle d'individu particulier. Et, tout au contraire de nos choix modernes, c'est la première qui dirige les comportements, l'homme individuel étant subalterne. On retrouve là le contraste entre le public et le privé que décrit si bien Hannah Arendt ( Condition de l'homme moderne), et la fusion "moderne" des sphères propres à ces deux concepts. Avec, comme conséquence, la fin corrélative des valeurs les plus spécifiques de chacune. C'est aujourd'hui les valeurs privées, domestiques (économie, sécurité, droit des individus, etc.) qui ont envahi les choix publics laissant au portemanteau les valeurs publiques (honneur, rang, etc.), mais aussi ouvrant au public l'intimité privée.
PhB livre au fil des pages les réflexions que lui inspire le fonctionnement de ce monde passé en comparaison à celui du nôtre. Sur la santé, sur l'individualisme, sur le secret, sur la sensualité, sur l'éducation, sur la nécessaire théâtralité des actes de l'homme public, toujours avec pertinence et bon sens.
Et aussi, en spécialiste réputé, il nous fait partager l'amour de Louis XIV pour la musique et la danse, bien qu'assez brièvement, puisqu'abordé ailleurs dans ses autres recueils.
Ce livre est un régal d'intelligence "française", léger et profond à la fois qui enrichit et distrait en même temps.
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Bonheurs en série. Bonheur de la contemplation intelligente des maîtres de la peinture d'abord. Bonheur de la compréhension profonde des signes, que ce soient ceux des tableaux ou des visages humains. Bonheur d'aimer aussi, avec ou sans souffrance.
Et, justement, ce récit nous fait le beau tableau d'une vie qui derrière l'ordre de la raison, amoureuse attentive des images, cache un profond désordre des sens, déçus après avoir été comblés. "J'ai eu pendant un mois la passion de la peinture" dit l'oncle, amoureux pendant un mois d'une femme. Souffrance sublimée.
Plus conventionnelle est la courte idylle du neveu. Elle ne se situe pas exactement dans la même veine que la première partie plus attachante.
Quoi qu'il en soit, on est ici bien loin du bruit et de la fureur qui nourrissent nos actuelles nourritures littéraires. On peut y trouver son miel ou s'y sentir les doigts un peu poisseux. Nostalgie d'un monde qui ressemblerait à un roman..