"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
Franz Marc (1880 - 1916) est un peintre allemand important, emporté par la guerre de 1914. Il fut un des fondateurs du mouvement "Der blaue Reiter" avec W. Kandinsky, et laisse à ceux qui le connaissent, la vision, entre autres, de ses chevaux peints en à plat ou cernés, si riches de vie.
Il fut mobilisé en 1914, et décida d'écrire chaque jour à son épouse, des courriers brefs où il aborde ce qui lui semble l'essentiel : son amour pour sa femme et la vie simple qu'il entend mener auprès d'elle, sa vocation de peintre, ses amis et la guerre dont il est autant spectateur qu'acteur. Et, ici ou là, se glissent des réflexions sur mille autres sujets, qui caractérisent les inquiétudes de l'époque plongées dans le drame de cette guerre.
Thomas Bernhard est un écrivain autrichien de langue allemande, né en 1931, dont la vie fut un combat fréquent contre la maladie. Il le perdra en 1989.
Ce roman, de 1978, décrit une phase de cette lutte, et une victoire, provisoire, de l'auteur. Il nous raconte comment ce dernier prit une "décision" de vivre, à demi inconscient dans le mouroir d'un hôpital sinistre. Et cette décision est un révélateur, une renaissance qui donne à TB l'opportunité d'une vue sans faux semblant sur lui même, sur ceux qui l'entourent et sur la relation entre lui et eux.
La mort des autres, la réification de ces corps qui ont perdu leurs propriétés d'humains, la supériorité autoritaire des soignants, la solitude du mourant et la proximité angoissante de sa propre mort, tout cela est décrit par TB avec une simplicité , une sincérité que je n'avais jamais trouvées ailleurs. A cela s'ajoute la révélation qu'il y a, tout près de cette vie qui fuit, des choses importantes qui valent la peine de décider de lutter pour survivre : un grand-père qui a laissé dans le coeur du narrateur des pensées importantes et chaudes qui donnent un sens au monde, une mère méconnue qui se révèle et, tout au bout, lorsque la solitude est là, la communion avec la pensée des hommes par la lecture des livres qu'ils ont écrits. Tout cela est bien autocentré, dira-t-on ; se reconstruire est en effet le thème de ce livre et s'affirme ici comme la priorité de celui qui a failli tout perdre, même sa vie.
Le style est original : de longues phrases, un ton uniforme, un murmure, une confidence qui ne veut rien oublier car tout peut, à tout moment, basculer.
Un bon livre, sensible et puissant.
Éditions NRF Gallimard 1983
Imaginons une population de 100000 habitants dont 1000 sont atteints d'une maladie. 20 ans plus tard la population a augmenté à 200000 habitants, et 1200 sont atteints de la dite maladie. Faut-il conclure que :
- la maladie a augmenté de 20%, ce qui est un recul ?
- l'incidence de cette maladie est passée de 1,0% à 0,6%, ce qui est un progrès ?
Tout le débat de ce livre est là, ce qui peut paraître, à première vue, futile. Et cependant, il est facile de comprendre que la vision pessimiste, la plus facile à répandre, conduit à des prévisions et à des actions bien différentes de celles de la seconde vision.
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