Je suis à la fois fasciné et un peu déçu par ce livre exceptionnel. Un texte de près de mille pages n'est pas quelque chose qu'un auteur aurait écrit par hasard, par jeu. Mais il demande parfois au lecteur un effort dont je me demande si ce qu'il apporte le justifie. On y ressent une force littéraire éblouissante, un génie rare de la description des hommes, de leurs vies et de leurs relations sociales dans un milieu confiné, celui d'un sanatorium dans les années 1910. Mais, ce qui leur reste de liberté, outre les fonctions animales, est l'usage, pour certains, du jeu de leurs esprits. Est-ce le temps qui a passé, est-ce l'absence de culture en particulier scientifique, mais ces longs débats dans ce monde fermé, en particulier sur le temps, la maladie, la biologie, la société, accouchent d'une souris, ne règlent rien et ont conduit à la guerre. Publié en 1923, le texte aurait pu s'aider des percées décisives de la science et se faire plus critique de cette stérilité intellectuelle ! Il nous surprend heureusement en contrepartie, par sa qualité romanesque et la force des portraits humains qu'il dresse.
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