"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
"L'obstination et l'ardeur des opinions sont la preuve la plus sûre de la bêtise" Montaigne, III,8
Si jamais, vous vous sentez en forme, et que cet état vous pèse, la lecture de ce roman devrait y remédier. Plus triste, plus sombre, plus gris, serait difficile à rêver. L'humidité et la moisissure de la ville morte, accompagnées des sons lugubres des cloches fêlées sauront ronger votre âme, dans l'hypothèse, heureusement improbable, où vous en ayez une.
On peut difficilement imaginer un rapport mieux documenté que celui-ci, sur la situation insurrectionnelle qui couve en Afghanistan et au Pakistan et que la force militaire contient, mais ne règle pas. On peut aussi difficilement imaginer réquisitoire plus incisif sur l'action foisonnante, presque échevelée et en tout cas inefficace, voire contre-productive, menée par l'Occident et au premier chef les USA, en mal de stratégie.
On peut voir ce bref roman comme une tentative d'effacer l'histoire, ou de blanchir la page déjà écrite de sa vie. C'est surtout un exercice de style d'un écrivain doué. Mais ça ne va pas bien loin.
Tout, ou presque, est invraisemblable dans l'aventure irrémédiablement inexpliquée qui arrive à notre héros. Inexpliquée, parce qu'inexplicable, sans doute. Et on sent qu'AN joue avec ses lecteurs. Elle place par exemple un mâle mystérieux et décontracté dans la même cage qu'une superbe femelle, elle aussi décontractée et elle semble jouer avec notre impatience de les voir s'accoupler sans que cela ne se produise vraiment... Habile teasing.
Et tout cela est si bien raconté ! Il est difficile de mieux parler d'un verre de champagne qu'AN ne le fait ici, par exemple. Le métier est là.
Mais au fond, il ne se passe rien. Je dirais qu'on boit plutôt la bulle que le champagne.
Pourquoi pas, une fois de temps en temps ?
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