"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
Quel livre ! Un rêve éveillé dans un monde encore proche, celui de la RDA, qui laisse aujourd'hui des traces profondes, pas seulement en Allemagne. Une superbe promenade balzacienne dans la société des 10 dernières années de cette RDA.
Dans un lieu et à une époque indéfinis, mais de structure politique féodale, ce récit est celui de la disparition d'un peuple trop faible pour se défendre et que son suzerain ne protége pas.
Un livre vif, bien écrit qui séduira les lecteurs amateurs d'aventure. A signaler d'abord que ce livre, qui est le premier roman de l'auteur, est édité en format numérique (epub) et en "autopublication". Le blog de l'auteur apporte les précisions voulues.
Une première remarque tient à la qualité, à la fluidité de la langue, qui rend ce livre agréable à lire. Les personnages sont bien posés, sans fioriture psychologique inutile.
On pourrait parler d'un roman de formation, qui se termine par l'échec d'une civilisation et le triomphe de la force brutale, conduisant le narrateur à mettre en doute les principes de son univers policé. Mais n'est-ce pas la règle que les hommes n'ont que les droits qu'ils sont capables de défendre ? Et ne serait-ce pas une dangereuse utopie qu'espérer qu'il en soit autrement ? Car ce serait alors construire des institutions sur des principes que l'expérience infirme.
Restons-en à l'aventure, bien menée, sans effets spéciaux et qui nourrira un très agréable moment de lecture. Que demander de plus ?
Si vous pouvez passer outre les jongleries avec les mots, souvent éthérées et presque irritantes, ce livre recèle une pensée forte et originale qui nourrira votre propre réflexion sur la vie.
Evacuons d'abord le premier point. Le style de l'auteur n'est pas en cause. Il est souvent plus près de celui d'un poème que d'une prose, ce qui lui confère une ouverture large vers ce qui excède et enveloppe la pensée logique. Ce qui, ici, sera souvent utile. En revanche, l'acharnement de l'auteur à décoder la génétique des mots pour les rattacher à d'autres mots, d'autres siècles, d'autres civilisations, me semble souvent artificiel, presque hors contexte. Regrets d'une logique, unitaire et causale, donnant à notre monde un squelette sous-jacent ? Peut-être, mais la répétition de ce procédé rompt le rythme du texte et est d'un apport, à mes yeux, limité.
Ceci posé, qui n'est que de forme, revenons à l'essentiel qui, lui, est admirablement traité. Parmi le foisonnement des idées, propositions, aveux parfois de l'auteur, j'en retiendrai trois qui me paraissent essentielles.
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