"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
"L'obstination et l'ardeur des opinions sont la preuve la plus sûre de la bêtise" Montaigne, III,8
Si vous pouvez passer outre les jongleries avec les mots, souvent éthérées et presque irritantes, ce livre recèle une pensée forte et originale qui nourrira votre propre réflexion sur la vie.
Evacuons d'abord le premier point. Le style de l'auteur n'est pas en cause. Il est souvent plus près de celui d'un poème que d'une prose, ce qui lui confère une ouverture large vers ce qui excède et enveloppe la pensée logique. Ce qui, ici, sera souvent utile. En revanche, l'acharnement de l'auteur à décoder la génétique des mots pour les rattacher à d'autres mots, d'autres siècles, d'autres civilisations, me semble souvent artificiel, presque hors contexte. Regrets d'une logique, unitaire et causale, donnant à notre monde un squelette sous-jacent ? Peut-être, mais la répétition de ce procédé rompt le rythme du texte et est d'un apport, à mes yeux, limité.
Ceci posé, qui n'est que de forme, revenons à l'essentiel qui, lui, est admirablement traité. Parmi le foisonnement des idées, propositions, aveux parfois de l'auteur, j'en retiendrai trois qui me paraissent essentielles.
CL est le réalisateur du film immense Shoah. Ce roman autobiographique est l'histoire de son mûrissement conscient et inconscient et transcende les joies et les peines d'un homme intelligent, vivant au coeur du Paris d'après-guerre.
En dépit de sa taille, ce récit est passionnant du début à la fin, même si les convictions et les enthousiasmes de CL sont parfois restés pour moi tellement subordonnés à une vision idéalisée du monde, qu'il est bien difficile de toujours les partager.
Ce roman, généreux et optimiste, appelle de ses voeux une réconciliation des peuples algériens et français, au delà de l'histoire tourmentée récente. Nous le souhaitons tous, mais les conditions nécessaires sont-elles là ?
L'intrigue porte sur le destin (les destins, plutôt !) des Harkis. Ceux-ci ont intégré les rangs de l'armée française en Algérie, espérant y trouver de quoi vivre, là où la misère endémique sévissait. Peut-être aussi désapprouvaient-ils la violence et les exactions du FLN ? Le roman le laisse entendre, parfois.
Lire la suite... Hacène Rabah Bouguerra, La Forfaiture du Corbeau
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