"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
"L'obstination et l'ardeur des opinions sont la preuve la plus sûre de la bêtise" Montaigne, III,8
Pendant 20 ans, un intellectuel français, Georges Pâques (GP), normalien, haut fonctionnaire, a trahi pour le compte du KGB russe, sans être inquiété. Il ne le sera guère plus après son arrestation, puis rapidement libéré, bien protégé par ses pairs. Une étonnante biographie romancée (à mon sens partielle) de cette trahison à tiroirs.
La thèse que l'orgueil démesuré de GP l'aurait conduit, seul face à sa conscience, à commettre sa trahison, me paraît légère. Il méritait à l'époque la peine de mort, requise lors de son jugement, puis commuée en prison. Cerise sur le gâteau, il fut libéré assez rapidement. Cela prouve la sollicitude dont il a bénéficié d'un Etat qui, sans doute, avait des dettes à son égard.
Il me semble que l'histoire des relations complexes entre la France et la Russie soviétique, face aux USA n'a pas encore reçu la clarté nécessaire. De Gaulle partageait un anti-américanisme sévère avec GP et, plus largement avec les "intellectuels communistes" français. Etait-ce un choix ou une obligation ? Des faits inexpliqués abondent dans l'histoire française de cette époque, faits qui s'expliqueraient sans doute mieux, comme la mort de Jean Moulin, si cette histoire était écrite. La protection dont GP a bénéficié, y compris pendant les 20 ans de son trafic avec les Soviétiques, me semble donc patente et relever de cette histoire souterraine.
Quoi qu'il en soit, le roman est excellent, bien écrit, même si son rapport à la réalité est douteux. Cela ne devrait en rien gâcher son succès : voyez la Bible ...
L'Europe, en 2012, est en crise, crise révélée par les dettes abyssales des nations. Mais cette crise est plus profonde : l'Europe n'appartient pas aux peuples qui la composent. Elle est plus subie que voulue. Son destin même est en question.
Ce livre est une mine de réflexions pertinentes, provenant de praticiens de l'Europe, ce qui lui confère le poids du réel. On pourrait presque le résumer par un rejet motivé des attentes contradictoires qui incarnent l'impasse actuelle : "Vouloir être aussi forts que si l'Europe était unie, conserver autant de souveraineté nationale que si elle ne l'était pas". Et c'est bien entendu de cela que les auteurs nous invitent à sortir.
Lire la suite... Sylvie Goulard et Mario Monti, De la démocratie en Europe
Un chef d'orchestre tourmenté et génial, Carlos Kleiber, trouve ici son biographe passionné, à travers les propos d'un violoniste attentif et séduit.
Carlos Kleiber fut un des derniers chefs romantiques, obsédé de perfection, comme le furent à leur manière d'autres musiciens, comme Glenn Gould ou C Celibidache. Obsédés jusqu'à la monomanie, jusqu'à une certaine stérilité qu'imposait une recherche éperdue d'absolu.
On peut trouver cela excessif, fanatique, mais cela existe, vouant parfois au mépris (voyez les vidéos de C Celibidache !) ceux qui ne suivent pas le maître. On peut aussi appeler cela du génie... jusqu'à ce que la mode de l'interprétation change ou que la qualité de la prise de son périme l'enregistrement. Eblouissement de l'instant vécu, sans doute. Définitif (ce que pensait C Kleiber), je ne le pense pas.
Quoi qu'il en soit, ce livre décrit avec verve la vie de Kleiber ( vivait-il vraiment ?) vue par le regard d'un violoniste du rang imaginaire. L'idée est intéressante et rend bien l'intimité d'un musicien avec un chef qu'il vénère. Et puis, c'est un hommage que chacun peut comprendre et apprécier, à une grande figure de la musique, que le temps commence à effacer.
La lecture est agréable et coule sans pédanterie musicologique. Un excellent livre.
Page 167 sur 328