"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
"L'obstination et l'ardeur des opinions sont la preuve la plus sûre de la bêtise" Montaigne, III,8
Une moderne "Belle au Bois Dormant" va recevoir la grâce de l'éveil d'un Prince de la paléobotanique. Le Bois, c'est Montsouris (enfin, presque) et la Belle a le sommeil plutôt profond. Quant au Prince, il lui faudra sacrifier ce qu'il croyait être le fil de son destin pour mériter sa Belle. On n'a rien sans rien... Mais il le fait avec simplicité, avec facilité même. Un joli rêve.
Le parc Montsouris est le lieu focal de ce roman. Ses allées, ses plantes (cryptogames ou phanérogames, mais si !) sont, au fond, un terrain de méditation sur les voies de la fortune, allez, osons, de la sérendipité. Il y faudra quelques médiums humains bienveillants pour que le sens de sa quête se révèle après que le hasard (?) d'une photo perdue ait mis en branle la voie nouvelle du fatum du Prince. Rassurez-vous, il va être à la hauteur du défi.
Ce roman est sympathique et agréable, bien écrit, tout en douceur, même si, parfois, un peu de technicité paléobotanique sonne étrangement et confère au récit une petite distance savante. Rien de grave, pourtant. C'est l'occasion d'apprendre quelque chose, bande d'ignorants ! Enfin, je parle pour moi.
Et puis, mon âme d'enfant adore les histoires qui finissent bien, dans un monde nettoyé d'effets spéciaux et de grands sentiments verbaux. Vous aussi ? Alors, n'hésitez pas, ce roman vous plaira.
Clemenceau, c'est un peu après le Big Bang, non ? A une époque où l'énergie était dense, les interactions violentes. Heureusement, maintenant on est "normal", aimable et bienséant, tout ce que n'était pas Clemenceau. Mais lui, il savait ce qu'il voulait... la guerre, quand les Français commençaient à douter.
FG a écrit là une brève biographie remarquable, sur un homme d'Etat exceptionnel dont les actes et le verbe ont changé le cours du destin. Certes, il n'était pas facile ; il avait du caractère. Bref, il était plus que "normal", ce qui paraît indispensable pour diriger et prendre des décisions qui ne fluctuent pas en fonction de l'humeur des foules et en particulier de ceux qui hurlent plus que les autres. Il n'hésitera pas, par exemple le 1er novembre 1919, pour assurer l'ordre, à faire charger sabre au clair les veuves et les mutilés de guerre.
Ce livre est aussi une porte sur la 3e République, ses procédures et ses éclats, ses hommes politiques, sa caste guerrière dont les rapports avec Clemenceau n'ont pas toujours été fameux. La guerre est une chose trop sérieuse pour être confié aux militaires, dira-t-il. Clemenceau n'était pas un hobereau terrien, mais un homme du siècle industriel en mutation. Il avait pris conscience de l'importance du peuple ouvrier, tout en gardant ses distances avec les extrémismes.
Un livre passionnant sur une époque qui s'éloigne et sur un homme fort, un chef, comme il en naît parfois dans les périodes exceptionnelles.
La terre se met à tourner moins vite et devient, à moyen terme, impropre à la vie. A contre-courant, une adolescente découvre qu'elle aurait pu aimer cette vie qui s'échappe. Une sorte de tragédie pessimiste contemporaine, froide et désespérée.
L'affaire est peu vraisemblable : pour que la terre ralentisse, il faudrait qu'ailleurs, quelque chose d'énorme lui prenne son moment angulaire, ou que sa taille ou sa structure change ! Ca se verrait. Mais une fois cet événement accepté (tout le monde n'a pas mon respect pour le moment angulaire), l'affaire est bien menée et, il me semble, assez vraisemblable quant aux conséquences de ce ralentissement qui, à terme, rend la vie impossible.
Une adolescente, auteur de ce journal, sage et solitaire, découvre la vie. Elle prend conscience de la beauté de ce monde, de son affection pour certains êtres et de son indifférence à d'autres, de l'instabilité des sentiments, de la fragilité des liens entre les hommes. Et, bien entendu, elle découvre l'amour, mais dans les conditions éprouvantes de ce monde en ruine. Une sorte de roman d'initiation au crépuscule...
Le tout est dit sans emphase, froidement, calmement, presque avec une recherche de banalité d'expression. Cela renforce la fatalité inexorable de l'intrigue de ce récit. Chaque mot apporte sa charge d'inquiétude, d'écrasement, jusqu'à la perspective, devenue évidente, qu'un miracle seul puisse dévier le destin. Mais nul ne croit plus aux miracles. Alors, on ravaude sa vie.
Ce roman est bien de son temps, en ce qu'il se démarque du fantastique "classique" par le fait qu'il n'est plus local. Il ne s'agit plus d'un esprit vengeur, d'un lac mystérieux, d'un miroir magique, mais d'un embrasement du monde entier, à l'image d'un cinéma américain populaire. Cela traduit sans doute une inquiétude relayée par les mythes millénaristes actuels. Soit...
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