"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
Büchner , né en 1813, meurt du typhus à vingt-quatre ans en 1837. Les trois pièces de ce livre ont été écrites entre 1832 et 1837, trois pièces fort différentes.
La Mort de Danton est une sinistre variation désespérée sur le destin. L'homme trompe son inquiétude par ce qu'il trouve : ici, la révolution et ses jeux cruels d'absolutisme sanglant. Soit. Alors, pour se prouver qu'il existe, il guillotine. Drôle, non ? Il s'en lasse, d'ailleurs, ce pauvre Danton. Ses copains finissent par avoir peur de ce qu'il pourrait faire de sa grande notoriété avec une tête pleine de pensées vagues. Alors ils la lui coupent. Logique. Tout cela est écrit dans un style ampoulé type Théâtre National (socialiste, d'ailleurs) Populaire, plein de bonne conscience. J'ai eu du mal à terminer, tant l'ennui, voire le rejet de ces clowneries irresponsables fatigue.
Léonce et Léna est une comédie, dont je dirais, pour faire bref, qu'elle se conclut sur l'apologie des 35 heures (voire moins). Le très jeune Büchner nous fait part de son très grand pessimisme sur la capacité des hommes à diriger. Qu'en sait il ? C'est une pose, sans contenu réel et sans expérience. Nous sommes hélas encore entourés de ce genre de commentaires intellectuels creux. C'est politiquement correct mais plutôt indigne d'un esprit qui veut raisonner droit. C'est cependant assez bien écrit, là aussi très TNP.
Woyzeck travaille dans la classe supérieure, mais relevant aussi d'un semblable pessimisme sur notre espèce. Elle est cruelle, abuse de son pouvoir, et se réjouit du mal qu'elle fait. L'histoire n'a rien démenti de cet aspect, mais ne voir que cela, dénoncer seulement parait court. A la décharge de Büchner, on doit reconnaître que son époque tourmentée ne lui facilitait pas une vision irénique des rapports sociaux ! Il me semble cependant que sans Alban Berg, cette pièce ne pèserait plus très lourd.
Je suis globalement très négatif vis à vis de cette littérature facile, mais profondément intolérante. Que Büchner ait une facilité, un style direct, c'est vrai. Qu'il le mette au service de son inexpérience du monde pour avancer des propositions nihilistes, c'est au mieux une maladie de jeunesse, au pire un dévoiement. Le 20ème siècle a tant souffert de ces imbéciles fanatiques dressés sur leur ignorance pour affirmer que la race juive doit être anéantie ou que les lendemains qui chantent passent par les goulags et les massacres que voir chez cet auteur les germes de cela me fait dresser sur mes ergots. Monsieur Büchner, bonsoir.
Éditions L'Arche 1999
Léo Perutz né à Prague en 1882 est mort en 1957. Juif, il devra quitter Vienne au moment de l'Anschluss et s'installera en Palestine. Venu tard à la littérature, il n'écrira que 13 romans.
Celui-ci date des dernières années de sa vie et ne sera publié qu'en 1959, après sa mort. L'histoire est simple et linéaire. Dans la ville de Milan, en 1498 Léonard de Vinci peint une oeuvre majeure pour un couvent et veut en faire un témoignage de son génie à la postérité. Il ne s'accorde aucune faiblesse et bute sur une difficulté qu'il veut résoudre à tout prix avant de terminer son oeuvre. En effet, il ne trouve pas de modèle au Judas de la Cène qu'il est en train de peindre et passe son temps à le rechercher dans tous les lieux de Milan. En fait il ne sait pas ce qu'est un traître et ce roman est le cheminement de Léonard vers cette "vérité" qu'un traître (à qui Jésus n'accordera pas son pardon !) est un homme qui a trahi l'amour ; encore faut-il qu'il ait aimé... Jésus aurait tout pardonné sauf cela.
Au delà de cette thèse, sympathique mais discutable, ce roman se lit comme une aventure, bien écrite, à la lecture facile et coulante. Le cadre historique est un prétexte, un décor, mais l'Histoire n'y trouvera certes pas son compte. Les personnages sont précis et bien campés sauf un Léonard un peu absent. En revanche le personnage qui sera le 'Judas de Léonard' et qui assassine son amour pour réaliser ses plans dérisoires est remarquablement traité. L'intrigue nous retient jusqu'à la dernière page sans faiblir. Les dialogues sont extrêmement vivants et en parfaite adéquation avec les personnages. On ne s'ennuie pas pendant les quelques heures de cette lecture qui plaira à tous.
Éditions Phébus 1989
Je recommande vivement la lecture de ce livre écrit en 1994 à ceux que la fréquentation des sciences ne rebute pas, qui ont un bagage minimal de physique, et une disposition à la logique suffisants. Mais cela ne devrait-il pas, dans le monde tel qu'il est, être au coeur de notre culture ? Les erreurs proférées parfois par des personnages par ailleurs biens sous tous rapports et ayant fait de longues études en font douter...
Roland Omnès est un physicien théoricien qui a beaucoup contribué et participé à la vie intense des années d'explosion de la physique des particules élémentaires, ce qui lui donne une grande autorité sur les sujets abordés.
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