"Il n'existe qu'une langue pour exprimer des vérités absolues : la langue de bois"
"L'obstination et l'ardeur des opinions sont la preuve la plus sûre de la bêtise" Montaigne, III,8
Cet essai, écrit vers 1930, est enrichissant, irritant et difficile. Il est enrichissant par son observation des conséquences des attentes de performance du travail sur le fonctionnement de nos sociétés, attentes qui dominent toutes les autres. Il est irritant par les conclusions discutables qu'il en tire. Il est enfin difficile par un style elliptique, empreint de passion froide, peu soucieux de preuve, mais en recherche permanente d'assentiment.
Amélie Nothomb nous donne ici encore un roman léger, agréable à lire, mais dont l'ambition et le résultat vont plus profond que cette peau lisse de l'apparence. Au fond, elle nous rappelle que l'exil est une souffrance, car notre moi intime que les premières années de notre existence ont nourri et formé est un bloc indestructible qui prend toujours le pas sur nos émotions et désirs ultérieurs. Et donc, ici, que l'amour du Japon ne signifie pas que l'on puisse devenir japonais, ni, surtout, perçu comme tel par les autochtones.
Je ne sais pas si l'on doit lire ce récit incandescent. Il est des vérités si douloureuses qu'elles paralysent la raison sans laquelle les passions, seules, mènent la danse jusqu'au prochain crime. Le sang appelle le sang ; les dieux s'en nourrissent et en redemandent, sans pour autant apporter la paix. Comme le dit l'auteur, "parce que Dieu ne suffit pas..." Dieu, cette image rêvée de la folie d'absolu des hommes. Non, il ne suffit pas. Alors, quand certains hommes commettent en son nom des massacres abyssaux, d'autres excusent les hommes pour ne pas avoir à excuser Dieu. Être victime devient alors un péché et l'Aube, un crépuscule. Ce livre frémit de crimes et d'impuissance humaine.
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